Quâest-ce que la vĂ©ritĂ© ? Et la vĂ©ritĂ© est-elle lâapanage du christianisme ? Quâest-ce que la vĂ©ritĂ© ? Vous vous souvenez sans doute de cette rĂ©plique de Pilate dans le rĂ©cit du procĂšs de JĂ©sus dans lâĂ©vangile de saint Jean. Il exprimait certainement le doute profond dâune culture paĂŻenne rĂ©pandue dans lâEmpire romain, dans lequel la multiplicitĂ© des dieux nâarrivait pas Ă combler lâaspiration des hommes au sens de leur vie. Notre culture et notre sociĂ©tĂ© ont suscitĂ© beaucoup de systĂšmes pour promettre Ă lâhomme le salut et le bonheur. Le siĂšcle Ă©coulĂ©, pour ne remonter quâĂ lui, nous a proposĂ© successivement le salut par le progrĂšs indĂ©fini des sciences et de la prospĂ©ritĂ© Ă©conomique puis le salut par la rĂ©volution marxiste. Lâun et lâautre ont eu leur temps de sĂ©duction et ils ont engendrĂ© des attachements comparables Ă une foi religieuse. Lâun et lâautre nous ont montrĂ© leurs limites Ă dĂ©livrer lâhomme. AprĂšs ce que lâon a dĂ©signĂ© comme la chute des idĂ©ologies, nous avons vu se dĂ©velopper le scepticisme ou le cynisme gĂ©nĂ©ralisĂ©s. Puisque nous nâavons pas rĂ©ussi Ă construire par nous-mĂȘmes notre propre bonheur, pourquoi ne pas prendre acte de cette impossibilitĂ© et pourquoi ne pas renoncer Ă une ambition dĂ©mesurĂ©e ? Pourquoi ne pas nous en tenir Ă la gestion quotidienne des difficultĂ©s en nous efforçant de trouver des protections Ă notre mesure, chacun pour soi. Ainsi surgit un nouveau mythe sĂ©curitaire la sociĂ©tĂ© doit nous materner et nous Ă©viter les risques de la vie. Pour lâavenir, il nous suffit de dĂ©crocher le diplĂŽme qui donne accĂšs aux emplois protĂ©gĂ©s et Ă attendre la retraite, la plus prĂ©coce possible. La dĂ©couverte de la vĂ©ritĂ©, la dĂ©couverte du mystĂšre fondateur de la vie est un chemin, une route. Je pense Ă Abraham quâon dĂ©signe depuis toujours du nom de PĂšre des croyants. Vous connaissez la parole que Dieu lui a adressĂ©e Pars de ton pays, de ta famille, et de la maison de ton pĂšre vers le pays que je te ferai voir » Gn 12, 1. Mais aussi et surtout Ă cette parole de JĂ©sus Je suis le chemin, la vĂ©ritĂ© et la vie » Jn 14, 6. Remarquez la proximitĂ© de ces trois mots chemin, vĂ©ritĂ© et vie. Ils sâĂ©clairent mutuellement il nây a pas de vĂ©ritĂ© et de vie en dehors dâun chemin Ă parcourir. Alors, on comprend lâimportance de cet appel que JĂ©sus adresse si souvent aux personnes quâil rencontre Viens et suis-moi ». La connaissance de la vĂ©ritĂ© ne mobilise pas notre seule intelligence, mais elle engage toute notre personne. Au terme du second millĂ©naire, le christianisme se trouve, prĂ©cisĂ©ment dans le domaine de son extension originelle, en Europe, dans une crise profonde, qui repose sur la crise de sa prĂ©tention Ă la vĂ©ritĂ©. Cette crise a une double dimension tout dâabord se pose toujours plus la question de savoir sâil est juste, au fond, dâappliquer la notion de vĂ©ritĂ© Ă la religion, en dâautres termes sâil est donnĂ© Ă lâhomme de connaĂźtre la vĂ©ritĂ© proprement dite sur Dieu et les choses divines. Lâhomme contemporain se retrouve bien mieux dans la parabole bouddhiste de lâĂ©lĂ©phant et des aveugles un roi dans le nord de lâInde aurait un jour rĂ©uni en un lieu tous les habitants aveugles de la ville. Puis il fit passer devant les assistants un Ă©lĂ©phant. Il laissa les uns toucher la tĂȘte, en disant câest ça un Ă©lĂ©phant. Dâautres purent toucher lâoreille ou la dĂ©fense, la trompe, la patte, le derriĂšre, les poils de la queue. LĂ -dessus le roi demanda Ă chacun comment câest, un Ă©lĂ©phant ? Et selon la partie quâils avaient touchĂ©e, ils rĂ©pondaient Câest comme une corbeille tressĂ©e... câest comme un pot... câest comme la barre dâune charrue... câest comme un entrepĂŽt... câest comme un pilastre... câest comme un mortier... câest comme un balai... LĂ -dessus - continue la parabole - ils se mirent Ă se disputer, et en criant LâĂ©lĂ©phant, câest comme ci, câest comme ça, ils se jetĂšrent lâun sur lâautre et se frappĂšrent avec les poings, au divertissement du roi. La querelle des religions apparaĂźt aux hommes dâaujourdâhui comme cette querelle des aveugles-nĂ©s. Car face aux secrets du divin nous sommes, semble-t-il, nĂ©s aveugles. Le christianisme ne se trouve en aucune maniĂšre pour la pensĂ©e contemporaine dans une position plus positive que les autres - au contraire, avec sa prĂ©tention Ă la vĂ©ritĂ©, il semble ĂȘtre particuliĂšrement aveugle face Ă la limite de toute notre connaissance du divin, caractĂ©risĂ©e par un fanatisme particuliĂšrement insensĂ©, qui prend incorrigiblement pour le tout le bout touchĂ© par lâexpĂ©rience personnelle. Ce scepticisme tout Ă fait gĂ©nĂ©ral Ă lâĂ©gard de la prĂ©tention Ă la vĂ©ritĂ© en matiĂšre de religion est encore Ă©tayĂ© par les questions que la science moderne a soulevĂ©es vis-Ă -vis des origines et des objets de la sphĂšre chrĂ©tienne. La thĂ©orie de lâĂ©volution semble avoir surclassĂ© la doctrine de la crĂ©ation, les connaissances concernant lâorigine de lâhomme surclassĂ© la doctrine du pĂ©chĂ© originel ; lâexĂ©gĂšse critique relativise la figure de JĂ©sus et met des points dâinterrogation vis-Ă -vis de sa conscience de Fils ; lâorigine de lâĂglise en JĂ©sus apparaĂźt douteuse, et ainsi de suite. La fin de la mĂ©taphysique » a rendu problĂ©matique le fondement philosophique du christianisme, les mĂ©thodes historiques modernes ont mis ses bases historiques dans une lumiĂšre ambiguĂ«. Aussi est-il facile de rĂ©duire les contenus chrĂ©tiens Ă un discours symbolique, de ne leur attribuer aucune vĂ©ritĂ© plus haute que les mythes de lâhistoire des religions - de les regarder comme un mode dâexpĂ©rience religieuse qui aurait Ă se placer humblement Ă cĂŽtĂ© dâautres. Car sâil ne sait pas dâoĂč il vient et pourquoi il existe, nâest-il pas en tout son ĂȘtre une crĂ©ature manquĂ©e ? Lâadieu apparemment dĂ©finitif Ă la vĂ©ritĂ© sur Dieu et sur lâessence de notre moi, lâapparent contentement de ne plus devoir nous occuper de cela, trompe. Lâhomme ne peut se rĂ©signer Ă ĂȘtre et rester pour lâessentiel un aveugle-nĂ©. Lâadieu Ă la vĂ©ritĂ© ne peut jamais ĂȘtre dĂ©finitif. » Joseph Ratzinger. Cet extrait tirĂ© dâun texte de Joseph Ratzinger, devenu peu aprĂšs BenoĂźt XVI, nous amĂšne Ă nous poser la question sur effectivement, le sens de la vĂ©ritĂ©. Car câest en recherchant la vĂ©ritĂ© que lâon arrive Ă comprendre finalement le sens de la vie. La seule question qui vaille finalement la peine dâĂȘtre posĂ©e durant notre cours passage dans ce monde. Une objection courante adressĂ©e au christianisme par les mouvements nĂ©o-gnostiques contemporains, consiste Ă dire que le chrĂ©tien prĂ©tend possĂ©der » la vĂ©ritĂ©. Comment pourrions-nous prĂ©tendre possĂ©der une personne ? Car pour les chrĂ©tiens, JĂ©sus est la vĂ©ritĂ©. De plus, Notre-Seigneur annonce quâil nous enverra lâEsprit de vĂ©ritĂ© pour nous introduire dans la vĂ©ritĂ© toute entiĂšre. Ce nâest donc pas nous qui possĂ©dons la vĂ©ritĂ©, mais lâEsprit qui nous y introduit. De plus, cette vĂ©ritĂ© se rĂ©vĂšle ultimement ĂȘtre celle de lâamour de charitĂ©, câest-Ă -dire du don gratuit. Comment pourrions-nous prĂ©tendre possĂ©der lâamour, alors que celui-ci nâest que don de soi ? LâEvangile nous rĂ©vĂšle que câest dans le don de nous-mĂȘmes que nous libĂ©rons le mouvement de la vie, cette vie que nous possĂ©dons dans la mesure mĂȘme oĂč nous la donnons. LâEglise catholique nâa jamais prĂ©tendu Ă lâapanage de la vĂ©ritĂ© » elle reconnaĂźt mĂȘme la prĂ©sence de semences du Verbe » sous-entendu de VĂ©ritĂ© » dans toutes les traditions. Mais elle prĂ©tend - ou plutĂŽt elle croit au sens fort de la vertu thĂ©ologale et non de la simple croyance - quâen JĂ©sus-Christ, cette VĂ©ritĂ© se rĂ©vĂšle en plĂ©nitude. Quant au Prologue de saint Jean, câest un des textes les plus commentĂ©s de la littĂ©rature universelle ! En des sens souvent contradictoires dâailleurs. LâEglise nâa jamais interdit Ă quiconque de se pencher sur ces versets, mais elle prĂ©tend que pour le comprendre de maniĂšre authentique, il faut le lire Ă la lumiĂšre de lâEsprit saint qui lâa inspirĂ© Ă saint Jean. Or la foi est prĂ©cisĂ©ment la lumiĂšre surnaturelle qui nous permet dâinterprĂ©ter les Evangiles en Esprit et vĂ©ritĂ© » Jn 4, 23. Donc finalement cette fameuse vĂ©ritĂ© si lâon lit bien Saint-Jean, cette vĂ©ritĂ© doit sâappeler Amour. Alors comment possĂ©der cette vĂ©ritĂ© qui est amour puisque lâamour est le don de soi aimer câest tout donner et donc se donner soi-mĂȘme ». Je ne peux donc pas possĂ©der le don. Car ce sont deux mouvements contradictoires. Or, qui dâautres que JĂ©sus-Christ est allĂ© jusquâĂ donnĂ© sa vie pour les hommes et devenir ainsi comme la plus parfaite reprĂ©sentation du don de soi ? Le commandement principal de JĂ©sus est donc lâAmour. Tous les commandements de Dieu - ne pas voler, ne pas tuer, ne pas mentir.. compris dans ce commandement que nous a donnĂ© JĂ©sus. En cela, le christianisme est la doctrine la plus simple du monde nous valons ce que vaut notre cĆur. Mais il faut cependant ĂȘtre attentif, car la parole amour » cache souvent des piĂšges. Un piĂšge, par exemple, est de confondre le sentiment quâon Ă©prouve envers les autres pour de lâamour, quand en fait, il sâagit seulement dâun vague sentiment Ă©pidermique. Lâamour vĂ©ritable est un don de soi il requiert sacrifice, abnĂ©gation et fidĂ©litĂ©. Un autre piĂšge, câest de croire que pour aimer notre prochain, nous devons satisfaire toutes ses demandes. Au contraire quand la demande qui nous est faite est erronĂ©e, si nous aimons vĂ©ritablement notre prochain, nous devons ĂȘtre capable de lui dire non. Mais aimer son prochain comme soi-mĂȘme est quelque chose de tellement difficile, que tous les grands saints ont justement observĂ© quâon ne peut y arriver que par amour pour Dieu. De mĂȘme quâil est vrai que celui qui nâaime pas son prochain ne peut pas dire quâil aime Dieu, il est aussi vrai que celui qui nâaime pas Dieu ne peut pas aimer vĂ©ritablement son prochain. JĂ©sus a expliquĂ© avec relativement peu de paroles ce que veut dire aimer ». Quelques heures avant sa passion, lors du dernier repas, il affirme une derniĂšre fois son commandement... mais ajoute une nuance riche de sens Aimez-vous les uns les autres, comme je vous ai aimĂ©s » Jn 13,34. Comme je vous ai aimĂ©... câest-Ă -dire, jusquâau point de mourir sur la croix pour nous. Câest cela lâextraordinaire mesure de lâamour chrĂ©tien
Si on insiste tant sur lâexigence de vĂ©ritĂ©, câest parce quâelle est, simultanĂ©ment, la condition pratique dâune vie partagĂ©e â se parlerait-on encore si tout ce que nous disons Ă©tait erronĂ©, ou mensonger ? â et la valeur selon laquelle on Ă©value tout Ă©noncĂ©, tout jugement. Ainsi, renoncer Ă la vĂ©ritĂ©, ce serait renoncer Ă la vie commune et faire perdre Ă la parole tout son sens, ne plus tenir parole, comme on dit. Ce serait renoncer Ă connaĂźtre quoi que ce soit. Pourtant, il y a des formes dâattachement Ă la vĂ©ritĂ© qui sont, aussi, encombrantes et trompeuses. AprĂšs tout, est-on si sĂ»r que ceux qui refusent obstinĂ©ment de renoncer Ă ce quâils appellent vĂ©ritĂ© », ne sont pas, en fait, fermement agrippĂ©s Ă une erreur ? Et quâest ce qui nous dit que la vĂ©ritĂ© soit bien la valeur, le mĂštre Ă©talon de tout propos comme elle prĂ©tend ĂȘtre ? Un doute semble demeurer sur tout jugement, qui empĂȘche de coller lâĂ©tiquette certifiĂ© vrai » sur les Ă©noncĂ©s, nous laissant indĂ©finiment en suspens, Ă©loignĂ©s dâune vĂ©ritĂ© qui se refuserait Ă nous, Ă laquelle dĂšs lors il faudrait bien renoncer. Alors, peut-on renoncer Ă la vĂ©ritĂ© ? On voit que la question se pose Ă de multiples Ă©chelles. Tout dâabord, il sâagit dâĂ©tablir sâil est simplement possible de le faire, et quelle forme peut prendre un tel renoncement. Ensuite, il faudra se demander si se dĂ©tourner ainsi de la vĂ©ritĂ© est lĂ©gitime. Enfin nous nous demanderons sâil est nĂ©cessaire de le faire, et ce, paradoxalement, pour sauver la possibilitĂ© de cheminer vers la libertĂ©. La façon la plus Ă©vidente de renoncer Ă la vĂ©ritĂ©, câest le mensonge. Et câest parce quâelle semble Ă©vidente quâil faut sâen mĂ©fier. En effet, si le menteur semble renoncer Ă la vĂ©ritĂ©, câest parce quâil ne la donne pas aux autres, prĂ©fĂ©rant prononcer des propos non conformes Ă la rĂ©alitĂ©. En apparence, donc, il renonce Ă la vĂ©ritĂ©. Mais en fait, on devrait plutĂŽt dire quâil condamne les autres Ă ne pas bĂ©nĂ©ficier de cette vĂ©ritĂ©, lui-mĂȘme nây renonçant pas, puisquâil la connaĂźt. En effet, pour mentir, il faut connaĂźtre la vĂ©ritĂ©. Pour travestir la vĂ©ritĂ©, il faut en disposer. Ce nâest donc pas Ă la vĂ©ritĂ© que renonce le menteur, mais au fait de la dire, câest Ă dire Ă la vĂ©racitĂ©. DĂšs lors, si on veut trouver de vĂ©ritables formes de renoncement Ă la vĂ©ritĂ©, il est nĂ©cessaire dâaller vers ceux qui, tout en disposant de celle-ci, choisissent de sâen Ă©loigner, sciemment, ne trompant plus les autres, mais eux-mĂȘmes. Il faudrait alors dĂ©montrer que nous sommes libres de le mettre en oeuvre un tel renoncement, quand bien mĂȘme nous souffririons dâun tel choix. Pour cela, il faudrait que, malgrĂ© la valeur suprĂȘme que constitue la vĂ©ritĂ© dans le domaine de la connaissance, on lui soit tout Ă fait indiffĂ©rent, quâil nous soit Ă©gal de la conserver, ou de la perdre. Or une telle possibilitĂ© existe si nous sommes dotĂ©s, dans ce domaine comme dans les autres, du libre-arbitre. En effet, tel que Descartes le dĂ©crit dans sa Lettre au PĂšre Mesland, le libre-arbitre est la facultĂ© dâopter quand, par ailleurs, on est totalement indiffĂ©rent aux termes du choix qui nous est proposĂ©. Et parce que nous ne sommes pas identiques aux fameux Ăąne de Buridan, qui meurt de faim et de soif Ă mi distance de son eau et de son avoine, parce quâil nâest pas dotĂ© de libre-arbitre, lâhomme, lui, peut ĂȘtre indiffĂ©rent Ă la vĂ©ritĂ© et Ă lâerreur, et choisir dĂšs lors lâerreur, parce que ça lui est Ă©gal. Certes, une telle indiffĂ©rence est la forme la plus basse de libertĂ©, comme lâĂ©crit Descartes, mais câest cependant une libertĂ© dont tout homme dispose, intĂ©gralement. En fait, la volontĂ© de lâhomme est Ă ce point sans limites quâil peut aussi opter pour lâerreur, y compris quand il nâest pas indiffĂ©rent Ă la vĂ©ritĂ©. Descartes le prĂ©cise dans la mĂȘme Lettre non seulement le libre-arbitre permet de choisir en dehors de tout motif et de toute prĂ©fĂ©rence, mais il permet aussi dâaller contre les motifs qui nous animent. Câest parce que nous sommes dotĂ©s de libre-arbitre que, tout en sachant pertinemment ce quâest le bien, et ce quâest le mal, et tout en Ă©tant convaincu quâil faut faire le bien, nous pouvons faire, volontairement, le mal. Et ce qui est valable pour la morale lâest aussi pour la connaissance tout en sachant ce qui est vrai, et ce qui est faux, nous pouvons, volontairement, arbitrer en faveur du faux. Nous pouvons sciemment accorder plus de valeur Ă la vĂ©ritĂ© quâĂ lâerreur, et nĂ©anmoins aller vers lâerreur, simplement parce que telle est notre volontĂ©. Câest ce quâon appelle la mauvaise foi, et non seulement tout le monde en est capable, mais chacun la pratique Ă lâoccasion. Et on le sait bien, elle consiste toujours Ă se dĂ©tourner dâune vĂ©ritĂ© quâon connaĂźt, Ă y renoncer. Finalement, on aurait pu simplement remarquer ceci le mot ignorance a deux sens. Ce peut ĂȘtre le simple fait de ne pas savoir quelque chose, de ne pas disposer dâune connaissance. Une telle ignorance est involontaire, elle peut mĂȘme ĂȘtre inconsciente. Mais lâignorance peut aussi ĂȘtre une action volontaire, comme on ignore quelquâun quâon croise dans la rue, on peut aussi ignorer une connaissance quâon sait ĂȘtre vraie. Ăvidemment, si la seule raison de renoncer Ă la vĂ©ritĂ© relĂšve de la mauvaise foi, on peut Ă©tablir quâun tel renoncement est certes possible, mais quâil ne semble ni lĂ©gitime, ni intĂ©ressant de le pratiquer. Cependant, jusque lĂ on nâa finalement abordĂ© que la question du renoncement Ă telle ou telle connaissance. Aussi Ă©trange que ça puisse paraĂźtre, on peut supposer quâon trouvera de meilleures raisons de rompre avec la vĂ©ritĂ© si cette rupture se fait de façon plus globale, en constatant lâimpossibilitĂ© de la saisir, ou en contestant le fait que la vĂ©ritĂ© puisse constituer, comme on lâa supposĂ© jusquâĂ maintenant. Le fait que les jugements se confrontent les uns les autres a trĂšs tĂŽt poussĂ© certains penseurs Ă considĂ©rer que toute connaissance est relative, que tout propos peut ĂȘtre contrĂ© par un propos inverse, que le principe de lâobjection est universel, et que par consĂ©quent il nây a aucun jugement absolu. Ces observations, qui sont celles des sceptiques, conduisent Ă renoncer Ă la vĂ©ritĂ© tout en continuant Ă voir en elle une exigence dont la quĂȘte est dĂ©sormais considĂ©rĂ©e comme vaine. Il est donc possible de reconnaĂźtre la vĂ©ritĂ© comme une valeur suprĂȘme, mais de la prendre tellement au sĂ©rieux quâon en vienne Ă penser quâaucun discours humain ne pourra jamais lâexprimer correctement, et que la pensĂ©e en sera toujours tenue Ă distance. Les sceptiques concluaient Ă une nĂ©cessaire suspension du jugement, câest Ă dire Ă un refus dâaffirmer quoi que ce soit comme vrai. Le doute devient alors, pour eux, la mĂ©thode Ă mettre en oeuvre et lâobjectif poursuivi. Ils doutent pour douter, et pour Ă©viter Ă tout prix de mettre fin au doute, câest Ă dire dâatteindre une quelconque certitude. Lâautre raison de renoncer plus profondĂ©ment encore Ă la vĂ©ritĂ© consiste Ă remettre en question, fondamentalement, le fait quâelle constitue cette valeur suprĂȘme permettant dâĂ©valuer tout discours. A priori, une telle proposition peut sembler insoutenable, puisquâelle conduit Ă retirer sa valeur au jugement lui-mĂȘme, et Ă rendre vaine la rĂ©flexion, et inutile lâexpression de la pensĂ©e. Pourtant, nous savons bien quâun jugement nâest pas nĂ©cessairement vrai, ou faux. Il y a des domaines dans lesquels les choses sont moins nettes, oĂč la pensĂ©e est davantage en mouvement, capable de formes diffĂ©rentes, multiples. Câest le domaine de lâinterprĂ©tation. Par exemple, quand on traduit un texte dâune langue vers une autre, il nây a pas une seule traduction qui soit LA bonne. Deux traductions peuvent ĂȘtre dâĂ©gale valeur sans pour autant ĂȘtre semblables. On ne parle pas alors de vraie » traduction, en opposition Ă lâensemble des autres traductions, qui seraient alors considĂ©rĂ©es comme fausses. On parlera plutĂŽt dâune traduction juste », qui sera en accord » avec le texte originel, et serait mĂȘme capable, peut-ĂȘtre, de le rĂ©vĂ©ler aux yeux des lecteurs. Nietzsche fait partie des penseurs qui ont privilĂ©giĂ© lâinterprĂ©tation, dans tous les domaines, plutĂŽt que les vĂ©ritĂ©s Ă©ternelles qui nâĂ©taient, pour lui, que ce Ă quoi doivent bien sâaccrocher ceux qui nâont pas lâaudace ou la volontĂ© dâĂȘtre eux-mĂȘmes, auteurs de leur pensĂ©e et de leur vie. La vĂ©ritĂ©, pour lui, câest le domaine de ceux qui ont les idĂ©es arrĂȘtĂ©es, ceux dont la pensĂ©e est figĂ©e dans des Ă©noncĂ©s qui resteront Ă©ternellement les mĂȘmes. Une pensĂ©e morte en somme. Le Bien, le Beau, le Vrai, ces grandes valeurs abstraites, platoniciennes, sont faĂźtes pour les penseurs fĂ©briles, qui ont besoin de se raccrocher Ă quelque chose de stable, qui leur indique quoi faire, quoi apprĂ©cier, et que penser. Sâil privilĂ©gie lâinterprĂ©tation, câest quâil y voit une pensĂ©e vivante, un mouvement qui donne aux jugements une forme perpĂ©tuellement nouvelle, qui permet les accords et dĂ©saccords, une dynamique qui permet Ă chacun de dĂ©velopper sa propre autoritĂ© intellectuelle , qui permet de sâaffranchir de la vĂ©ritĂ© comme un enfant renonce aux petites roues sur les cĂŽtĂ©s de son vĂ©lo, et acquiert son autonomie de mouvement on peut renoncer Ă la vĂ©ritĂ© toute faite, et se mettre en quĂȘte de nouveaux jugements quâon ne trouvera pas tout faits », puisquâon en sera lâauteur. Ce que Nietzsche remet en question, finalement, câest moins la vĂ©ritĂ© en elle-mĂȘme que la prĂ©tention que pourraient avoir certains Ă la dĂ©tenir, et Ă pouvoir contraindre les autres de lâaccepter telle quelle. AprĂšs tout, Nietzsche renoue alors avec une pratique de la pensĂ©e quâon a dĂ©jĂ vue se dĂ©velopper, et ce depuis lâAntiquitĂ©. Quand Socrate affronte le tribunal dâAthĂšnes, un des points de dĂ©saccord avec les notables athĂ©niens est le fait quâil affirme, un peu prĂ©tentieusement, ĂȘtre plus savant que les sages officiels de la CitĂ©. Or, la raison pour laquelle Socrate affirme cela est originale ce quâil sait, que les autres ne savent pas, câest quâil sait quâil ne sait pas, et que ce quâil ne sait pas, il ne prĂ©tend pas le savoir. En dâautres termes, il nâa pas atteint la vĂ©ritĂ©, et plutĂŽt que faire de ce manque une faiblesse, il considĂšre plutĂŽt cette ignorance comme une force, car elle le met en mouvement, elle le met en tension vers la vĂ©ritĂ©, elle lui donne une aspiration. Poussons cela un peu plus loin si la vĂ©ritĂ© demeure toujours au-delĂ de ce que notre pensĂ©e peut atteindre, câest quâelle est un objet de dĂ©sir. En effet, le dĂ©sir est un manque qui tend vers quelque chose qui ne peut pas ĂȘtre atteint. Par exemple, le dĂ©sir amoureux nâest jamais pleinement satisfait, pas plus que le dĂ©sir de reconnaissance. Câest sur cette distance infranchissable que la philosophie a construit son propre nom dĂ©sir de la sagesse. Et la sagesse, câest lâĂ©tat de perfection de celui qui a atteint la vĂ©ritĂ© suprĂȘme. Ce que nous dit le nom grec de la philosophie, amour de la sagesse », câest que la sagesse est toujours au-delĂ du point quâon a atteint, quâelle fait lâobjet dâune quĂȘte infinie et que, donc, il est nĂ©cessaire de renoncer Ă lâespoir dâatteindre un jour la sagesse, et la vĂ©ritĂ©, si on veut durablement demeurer philosophe. Car le philosophe est celui qui cherche, pas celui qui est parvenu au but ultime. Il est amoureux de la sagesse, et ne la possĂšde donc pas. Le philosophe, mais on pourrait dire la mĂȘme chose de tout chercheur, câest donc celui qui a renoncĂ© Ă la vĂ©ritĂ© pour mieux pouvoir la chercher. Cette forme de renoncement nâest pas une invitation Ă se dĂ©tourner de la vĂ©ritĂ©, encore moins Ă lui tourner le dos. AprĂšs tout, pour cheminer vers quelque chose, il faut bien admettre quâon ne lâa pas encore atteint. Le voyageur est celui qui a renoncĂ© Ă rester Ă oĂč il est, qui sait que lâessence du voyage, câest lâailleurs. Chercher la vĂ©ritĂ©, câest avant tout admettre quâon ne la possĂšde pas. Ainsi, toute vĂ©ritable dĂ©marche de rĂ©flexion doit bien commencer par la reconnaissance quâon nâa pas encore atteint sa conclusion. Câest cette façon spĂ©cifique de renoncer Ă la vĂ©ritĂ© que nous allons envisager maintenant. Le problĂšme avec les sceptiques, câest quâils font de lâimpossibilitĂ© dâatteindre la vĂ©ritĂ©, une vĂ©ritĂ©. Le point de dĂ©part de leur dĂ©marche est pertinent, mais contrairement Ă ce quâils affirment, ils ne parviennent pas Ă renoncer tout Ă fait Ă la vĂ©ritĂ© puisquâils sont convaincus que leur propre doctrine est vraie. Câest lĂ tout le paradoxe du scepticisme. Mais pour autant, lâimportance quâils donnent au doute vaut la peine dâĂȘtre retenue et approfondie, car elle concerne directement la question qui nous prĂ©occupe. En effet, ce que recommandent les sceptiques, câest de suspendre le jugement, de le retenir tant quâon nâa pas atteint une pleine certitude. Cette suspension est la forme de renoncement Ă la vĂ©ritĂ© que nous Ă©tudions maintenant elle consiste Ă admettre que ce quâon croit savoir est en rĂ©alitĂ© suffisamment douteux pour nĂ©cessiter une mise Ă lâĂ©preuve, une vĂ©rification qui exige quâon Ă©mette au moins lâhypothĂšse que ce savoir provisoire puisse ĂȘtre faux. Les sceptiques en font un principe dĂ©finitif, renonçant Ă la possibilitĂ© dâatteindre quelque certitude que ce soit. Mais on nâest pas obligĂ© dâaller aussi loin en leur compagnie, et ce dâautant plus quâen fait, on peut penser quâils vont un peu trop loin. En effet, on peut pratiquer le doute, non pas pour abandonner tout espoir dâatteindre la vĂ©ritĂ©, mais bel et bien afin de progresser vers celle-ci. AprĂšs tout, ce qui fait obstacle Ă la vĂ©ritĂ©, câest lâerreur. Or lâerreur est dâautant plus trompeuse quâau premier abord, elle a tout dâune vĂ©ritĂ©. Si les erreurs apparaissaient immĂ©diatement comme telles, on ne se tromperait jamais. Câest le constat que fait Descartes au dĂ©but du Discours de la mĂ©thode On sait bien que parmi nos soi-disant connaissances il y a des erreurs. Mais on ne sait pas distinguer a priori les unes et les autres. Câest pour cette raison que Descartes bĂątit une mĂ©thode permettant de traquer les connaissances erronĂ©es, et cette mĂ©thode se fonde sur la mise en oeuvre dâun doute radical, poussĂ© le plus loin possible avec une rĂšgle simple tout ce qui est douteux doit ĂȘtre considĂ©rĂ© comme faux. Ca ressemble au scepticisme, mais la grande diffĂ©rence entre le doute cartĂ©sien et le doute sceptique, câest que chez Descartes, le soupçon est une mĂ©thode dont le but est de parvenir Ă une connaissance qui rĂ©sistera au doute, une certitude indubitable quâon pourra considĂ©rer comme vraie. Les sceptiques, eux, font du doute le but de leur pratique, et renoncent donc Ă la vĂ©ritĂ©. Mais ce que Descartes montre, câest que le doute ne conduit pas nĂ©cessairement Ă un tel abandon. En revanche, il est bien nĂ©cessaire dâaccepter de se dessaisir de ce quâon croit ĂȘtre vrai pour se mettre Ă sa recherche, de se lancer dans la vide sans ĂȘtre assurĂ© de rejoindre une terre ferme, et dâaboutir Ă une premiĂšre connaissance certaine sur laquelle on pourra fonder toutes les autres connaissances, il faut bien douter de la vĂ©ritĂ© et la mettre Ă lâĂ©preuve, pour la vĂ©rifier. Comme on lâa dĂ©jĂ Ă©voquĂ©, la philosophie nâest pas seule concernĂ©e par cette façon de lĂącher la bride Ă la pensĂ©e et de considĂ©rer la vĂ©ritĂ© comme ce qui se tient toujours au-delĂ de la connaissance Ă laquelle on est dĂ©jĂ parvenu. Toute dĂ©marche visant Ă bĂątir des connaissances procĂšde en rĂ©alitĂ© de la mĂȘme façon. DĂšs lors, la science aussi se doit de renoncer Ă la vĂ©ritĂ© pour mieux pouvoir la poursuivre. Câest ce dont on prend particuliĂšrement conscience, au vingtiĂšme siĂšcle, avec la façon dont Einstein va remettre en question les sciences physiques telles quâelles sâĂ©taient constituĂ©es depuis Newton. On comprend alors que ce quâon avait cru assurĂ©ment vrai, Ă©tait en rĂ©alitĂ© fondĂ© sur un point de dĂ©part discutable, le postulat de la physique classique lâhomogĂ©nĂ©itĂ© de lâespace et du temps. Ce que les sceptiques auraient appelĂ© un fondement infondĂ© une fondation qui semble tellement Ă©vidente que personne nâa pensĂ© Ă lâappuyer sur quoi que ce soit. Einstein, en remettant en question cette fondation, sait quâil fait vaciller la totalitĂ© de lâĂ©difice. Pour autant, il nâest pas sceptique. Il est bel et bien en quĂȘte de connaissance, il pense cheminer vers la vĂ©ritĂ©. Sinon, il dĂ©truirait les constructions prĂ©cĂ©dentes sans chercher Ă en construire une nouvelle. Il pensera dâailleurs avoir atteint son but, et deviendra Ă son tour dogmatique, au moment oĂč la physique quantique naissante remettra en question son propre attachement au dĂ©terminisme. Ainsi, en science comme en philosophie, câest Ă dire lĂ oĂč on est, le plus, attachĂ© Ă la vĂ©ritĂ©, on doit accepter de rompre avec ce dont on sâest engagĂ© Ă la chercher toujours. Comme Pascal disait de Dieu Je ne te chercherais pas si je ne tâavais dĂ©jĂ trouvĂ© », rĂ©vĂ©lant en quelques mots tout la proximitĂ© distante qui se noue, complexe, entre le chercheur et lâobjet de sa quĂȘte, ceux qui sont en quĂȘte de vĂ©ritĂ© savent que, finalement, câest en prenant des distances avec le vrai quâon a le plus de chances de sâen approcher. Il est donc possible de se dĂ©tourner de la vĂ©ritĂ©. Il est mĂȘme possible de le faire de bien des maniĂšres, et pour bien des raisons, dont nous avons vu quâelles ne sont pas, toutes, bonnes. Renoncer au vrai pour se complaire dans lâerreur, câest possible, câest parfois comprĂ©hensible, mais on ne peut pas en faire une rĂšgle et câest courir le risque dâĂȘtre, assez vite, dĂ©sillusionnĂ©. En revanche, on a vu que la façon dont les sceptiques placent le doute au centre de la pensĂ©e, remettant dĂ©finitivement en cause la possibilitĂ© dâaccĂ©der au vrai Ă©tait intĂ©ressante, quand bien mĂȘme elle aboutissait Ă une conclusion intenable. Mais ce paradoxe rend cette pensĂ©e plus Ă©clairante encore. Car, tout compte fait, il est intĂ©ressant que, malgrĂ© la pertinence de chacun des arguments sceptiques, malgrĂ© la pertinence de lâensemble de ces arguments, il ne soit pas possible dâen conclure quâil faille renoncer dĂ©finitivement Ă la vĂ©ritĂ©. Ca ne tiendrait quâĂ la condition que cette thĂšse elle-mĂȘme ne soit pas prononcĂ©e. Ce que nous avons constatĂ©, câest quâil y a dans la mise en oeuvre du doute lâespoir que la connaissance parvienne Ă lui rĂ©sister. Mais au-delĂ de la mise Ă lâĂ©preuve de la vĂ©ritĂ© des connaissances dĂ©jĂ acquises, il apparaĂźt que dans le fonds, le vĂ©ritable renoncement Ă la vĂ©ritĂ© consiste Ă renoncer Ă disposer de la vĂ©ritĂ© comme sâil sâagissait dâun objet. Parce que la vĂ©ritĂ© demeure ce que seul le dĂ©sir peut viser, sans jamais lâatteindre, le renoncement est, en ce qui la concerne, la plus belle façon de la respecter, câest Ă dire de sâen tenir Ă distance. Toutes les illustrations sont extraites du film de Christopher Nolan, Inception. Le fait que ce film, comme dâautres chez Nolan, impose de ne pas savoir Ă quoi sâen tenir, sur sa fin, mais aussi, du coup, sur la totalitĂ© de son rĂ©cit, suffit Ă justifier ce choix dâillustration. Christopher Nolan, de façon gĂ©nĂ©rale, aime imposer au spectateur une lecture dont il pourra douter, parfois le film durant, et parfois au-delĂ des gĂ©nĂ©riques, de la nature de ce quâil a vu. En ce sens, ses films nâont pas de vĂ©ritĂ©, ils sont ouverts Ă tous les vents de lâinterprĂ©tation, et la meilleure façon dâentrer en phase avec un de ses films, câest de renoncer Ă le saisir, Ă le comprendre, pour laisser le mouvement opĂ©rer. Il nâest pas le seul Ă proposer une telle expĂ©rience, il est mĂȘme lâhĂ©ritier, sur ce point des maĂźtres que sont Hitchcock et Kubrick, et on peut lâaffilier, aujourdâhui, Ă David Fincher.
4 â la force il n'y a rien de pareil; «l'une ne fait point penser Ă l 'autre, ne suppose pas l 'autre, ne remplace pas l 'autre ». Aussi «l'honneur de la vĂ©ritĂ©, c'est de triompher par sa propre Ă©nergie; l'honneur de l'autoritĂ©, c'est de comprendre ce principe, c'est de laisser un libre chemin Ă la vĂ©ritĂ©, c'est d'avoir foi en la puissance de la vĂ©ritĂ©, et, en consĂ©quence
Devoir de philosophie . Douter, est-ce renoncer Ă la vĂ©ritĂ© ? Dans lâusage courant le mot douter se rapporte Ă une interrogation, un manque de certitude ou une mĂ©fiance quant ? la sincĂ©ritĂ© de quelque chose ou quelquâun. Le doute revient ? admettre quâon ne sait pas. Le verbe renoncer se rattache Ă un abandon et un dĂ©sistement. La vĂ©ritĂ© a ici un sens plus complexe. On peut la dĂ©finir en disant que constat descriptif de la rĂ©alitĂ©. On viendra donc Ă se demander Le doute dĂ©truit-il la vĂ©ritĂ© ? On verra tout dâabor est destructeur puis chemin de la vĂ©ritĂ©. Dans certains cas la p g itĂ© dogmatique -tre vue comme le . Par lĂ on entend quâelle est une affirmation considĂ©rĂ©e comme fondamentale, incontestable et intangible par une autoritĂ© politique, philosophique ou religieuse. Les premiĂšres personnes Ă qui on pense lorsque lâon Ă©voque cela sont les fanatiques religieux. Quand on dit fanatisme, on Ă©voque obstination, entĂȘtement, croyance aveugle et acharnement sans limite. Le fanatisme nous rend sourd et compacte ce qui ne nous met dans une situation de renfermement par rapport Ă lâextĂ©rieur et surtout vis-Ă -vis aux vis, idĂ©es ou remarques. La vĂ©ritĂ© devient abstraite car seule la notre reste vrai. CĂ©crivain français du 19Ăšme siĂšcle Victor Hugo d dit » Rien nâĂ©gale la puissance de surditĂ© volontaire des fanatismes. . par lĂ lâĂ©crivain appui le fait que les fanatiques ont une vision rĂ©duite de la vĂ©ritĂ©. En doutant de leurs idĂ©es religieuses tout est remit en question, voir dĂ©truit. La question a t-il un paradis oĂč lâon va aprĂšs la mort ? » peut engendrer une confusion considĂ©rable. Les croyants pourraient se poser des questions comme Pourquoi agir de telle ou telle façon si rien e nous attend aprĂšs ?. La croyance religieuse repose sur une certitude qui est la sienne et qui pour fonctionner, ne doit pas ĂȘtre douter. Cautre forme de vĂ©ritĂ© dogmatique est la superstition. La superstition se dĂ©finit comme un ensemble de croyances et de pratiques irrationnelles en contradiction avec lâordre de la nature et la raison. Câest une relation inexplicable entre deux Ă©lĂ©ments qui ne sont pas logiques. Les gens rĂ©ellement superstitieux sont rares. Par exemple le numĂ©ro treize est gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ© comme un chiffre porte-malheur. Bien que cette superstition est idiculisĂ©e par beaucoup de personnes, certaines personnes annulent tout rendez-vous un vendredi treize. MĂȘme ceux qui ne croient pas en de telles superstitions, ne sont pas surpris lorsque pleins de malheurs se produisent un vendredi treize. Cette superstition devient donc une vĂ©ritĂ© gĂ©nĂ©ral incontestable qui nâa Ă©tĂ© en aucun cas dĂ©montrĂ©. La superstition religieuse existe aussi. Elle est en gĂ©nĂ©ra 2 OF s incontestable qui nâa Ă©tĂ© en aucun cas dĂ©montrĂ©. La superstition religieuse existe aussi. Elle est en gĂ©nĂ©ral plus dangereuse » que celle de fait commun comme le chiffre treize. Si cette superstition est brisĂ© » elle peut menĂ© au malheur et au dĂ©sespoir. Elle nâest elle aussi pas contestable. Le philosophe Kant dans son texte Les Maximes fondamentales de la raison accuse la superstition dâĂȘtre un simple prĂ©jugĂ©. Pour lui la superstition a renoncĂ© ? faire un usage proprement rationnel de sa raison. Le philosophe conseil de ne pas sâenfermer dans sa logique qui nâest peut ĂȘtre pas la bonne. Dans les deux cas Ă©voquĂ©s le doute de la vĂ©ritĂ© est dĂ©vastateur. Il dĂ©truit une vĂ©ritĂ© qui est dite incontestable h. De ce fait elle disparaĂźt. Le doute nâest pas un renoncement Ă la vĂ©ritĂ©, câest au contraire une façon de le chercher. Platon affirmait que lâorigine de la philosophie est lâĂ©tonnement, câest-Ă -dire cette attitude qui consiste Ă sâinterroger, Ă ne pas se satisfaire des rĂ©ponses toutes faites et des opinions. Le philosophe ne possĂšde pas la vĂ©ritĂ©, il la recherche. Certains philosophes comme Socrate par exemple pense que la reconnaissance de sa propre ignorance est la condition pour trouver la vĂ©ritĂ©. Le doute permet de trouver la vĂ©ritĂ© lorsquâon parle dâillusion par exemple. ne illusion est une pparence trompeuse, une perception fausse, un jugement erronĂ©,⊠Le philosophe Platon parle de cell 3 OF s une perception fausse, un jugement erronĂ©âŠ. Le philosophe Platon parle de celle-ci dans le texte La RĂ©publique. Dans lâextrait du mythe de la caverne, Platon met en scĂšne des prisonniers ligotĂ©s de tel sorte quâil tourne le dos Ă la lumiĂšre et quâils ne voient que des ombres, sans savoir ce quâelles sont. Ils sont par la suite libĂ©rĂ©. Les prisonniers souffrent dâĂ©blouissement, dâexcĂšs de lumiĂšre et de traumatisme. Finalement les sujets sont forcĂ©s e sortir physiquement et mentalement de la caverne. Une fois dehors ils sâhabltuent Ă la lumiĂšre. Grace une la rĂ©flexion et au doute, ils se rendent compte de lâillusion dont ils ont Ă©tĂ©s victimes. Ces hommes Ă©taient prisonniers des apparences car ils ne remettaient pas en doute ce quâils voyaient. Le doute relativement Ă la connaissance est alors dĂ©fini comme le contraire de lâadhĂ©sion donnĂ© sans preuve Ă une idĂ©e, le doute est le recul nĂ©cessaire de la rĂ©flexion pour sâhabituer Ă la lumiĂšre de la raison. Le doute progressif sâapplique aux vĂ©ritĂ©s scientifiques. Celles-ci e sont pas seulement provisoires, elles font lâobjet dâun questionnement permanent dans le but de les remettre en question et de les tester. Les savants partent toujours du principe que leurs thĂ©ories sont peut-ĂȘtre fausses et quâils doivent les renforcer en les soumettant Ă des nouvelles expĂ©riences ou en les exposant Ă dâautres thĂ©ories concurrentes. De ce point de vue, la vĂ©ritĂ© ne peut 4 OF S expĂ©riences ou en les exposant Ă dâautres thĂ©ories concurrentes. De ce point de vue, la vĂ©ritĂ© ne peut jamais ĂȘtre dĂ©finitive au sens ou, si certaines thĂ©ories sont considĂ©rĂ©es comme vraies car on a pas montrĂ© quâelles Ă©taient fausses, il nâen reste pas moins que le savoir absolu nâest pas atteint et que le progrĂšs de la connaissance en gĂ©nĂ©ral est susceptible dâaboutir a une remise en cause de que lâon considĂ©rait jusque lĂ comme vrai. Selon Descartes lâidĂ©e devient vrais » lorsquâelle est soumise ? lâexamen du doute. A travers ce doute on dĂ©crypte un secret, on dĂ©couvre une rĂ©alitĂ© cachĂ©. Quand une vĂ©ritĂ© est dĂ©couverte elle prend son sens, sa puissance. Grace Ă ces deux cas on voit que le doute peut ĂȘtre la dĂ©marche de la vĂ©ritĂ©. AprĂšs avoir vue le caractĂšre destructeur du doute sur la vĂ©ritĂ© et le contraire, son caractĂšre progressif on peut en conclure que la vĂ©ritĂ© Ă©voque une notion de dĂ©passement. Son cote dogmatique ne sâapplique quâĂ une toute petite partie de la population, alors que le doute qui nous mĂšne Ă la vĂ©ritĂ© nous concerne tous. Mais la vĂ©ritĂ© est surtout en mouvement. Les philosophes Bachelard et Hegel pense tous les deux que la vĂ©ritĂ© nâest ni dĂ©finitive ni absolue. Elle a un caractĂšre inĂ©puisable , on peut toujours rajouter Ă celle-ci. Elle est rectifiable de façon permanente. S OF s
Leverbe ĂȘtre, quand il est employĂ© comme ici au sens relatif, peut signifier la rĂ©ciprocitĂ©, le caractĂšre convertible dâun jugement. Autrement dit, ici, les actions de douter et celle de renoncer Ă la vĂ©ritĂ© seraient rĂ©ciproques, câest Ă dire que la premiĂšre dĂ©coulerait de la deuxiĂšme et inversement. On voit ici une premiĂšre
Devoir de philosophie . Douter, est-ce renoncer Ă la vĂ©ritĂ© ? Dans lâusage courant le mot douter se rapporte Ă une interrogation, un manque de certitude ou une mĂ©fiance quant ? la sincĂ©ritĂ© de quelque chose ou quelquâun. Le doute revient ? admettre quâon ne sait pas. Le verbe renoncer se rattache Ă un abandon et un dĂ©sistement. La vĂ©ritĂ© a ici un sens plus complexe. On peut la dĂ©finir en disant que constat descriptif de la rĂ©alitĂ©. On viendra donc Ă se demander Le doute dĂ©truit-il la vĂ©ritĂ© ? On verra tout dâabor est destructeur puis chemin de la vĂ©ritĂ©. Dans certains cas la p g itĂ© dogmatique -tre vue comme le . Par lĂ on entend quâelle est une affirmation considĂ©rĂ©e comme fondamentale, incontestable et intangible par une autoritĂ© politique, philosophique ou religieuse. Les premiĂšres personnes Ă qui on pense lorsque lâon Ă©voque cela sont les fanatiques religieux. Quand on dit fanatisme, on Ă©voque obstination, entĂȘtement, croyance aveugle et acharnement sans limite. Le fanatisme nous rend sourd et compacte ce qui ne nous met dans une situation de renfermement par rapport Ă lâextĂ©rieur et surtout vis-Ă -vis aux vis, idĂ©es ou remarques. La vĂ©ritĂ© devient abstraite car seule la notre reste vrai. CĂ©crivain français du 19Ăšme siĂšcle Victor Hugo d dit » Rien nâĂ©gale la puissance de surditĂ© volontaire des fanatismes. . par lĂ lâĂ©crivain appui le fait que les fanatiques ont une vision rĂ©duite de la vĂ©ritĂ©. En doutant de leurs idĂ©es religieuses tout est remit en question, voir dĂ©truit. La question a t-il un paradis oĂč lâon va aprĂšs la mort ? » peut engendrer une confusion considĂ©rable. Les croyants pourraient se poser des questions comme Pourquoi agir de telle ou telle façon si rien e nous attend aprĂšs ?. La croyance religieuse repose sur une certitude qui est la sienne et qui pour fonctionner, ne doit pas ĂȘtre douter. Cautre forme de vĂ©ritĂ© dogmatique est la superstition. La superstition se dĂ©finit comme un ensemble de croyances et de pratiques irrationnelles en contradiction avec lâordre de la nature et la raison. Câest une relation inexplicable entre deux Ă©lĂ©ments qui ne sont pas logiques. Les gens rĂ©ellement superstitieux sont rares. Par exemple le numĂ©ro treize est gĂ©nĂ©ralement considĂ©rĂ© comme un chiffre porte-malheur. Bien que cette superstition est idiculisĂ©e par beaucoup de personnes, certaines personnes annulent tout rendez-vous un vendredi treize. MĂȘme ceux qui ne croient pas en de telles superstitions, ne sont pas surpris lorsque pleins de malheurs se produisent un vendredi treize. Cette superstition devient donc une vĂ©ritĂ© gĂ©nĂ©ral incontestable qui nâa Ă©tĂ© en aucun cas dĂ©montrĂ©. La superstition religieuse existe aussi. Elle est en gĂ©nĂ©ra 2 OF s incontestable qui nâa Ă©tĂ© en aucun cas dĂ©montrĂ©. La superstition religieuse existe aussi. Elle est en gĂ©nĂ©ral plus dangereuse » que celle de fait commun comme le chiffre treize. Si cette superstition est brisĂ© » elle peut menĂ© au malheur et au dĂ©sespoir. Elle nâest elle aussi pas contestable. Le philosophe Kant dans son texte Les Maximes fondamentales de la raison accuse la superstition dâĂȘtre un simple prĂ©jugĂ©. Pour lui la superstition a renoncĂ© ? faire un usage proprement rationnel de sa raison. Le philosophe conseil de ne pas sâenfermer dans sa logique qui nâest peut ĂȘtre pas la bonne. Dans les deux cas Ă©voquĂ©s le doute de la vĂ©ritĂ© est dĂ©vastateur. Il dĂ©truit une vĂ©ritĂ© qui est dite incontestable h. De ce fait elle disparaĂźt. Le doute nâest pas un renoncement Ă la vĂ©ritĂ©, câest au contraire une façon de le chercher. Platon affirmait que lâorigine de la philosophie est lâĂ©tonnement, câest-Ă -dire cette attitude qui consiste Ă sâinterroger, Ă ne pas se satisfaire des rĂ©ponses toutes faites et des opinions. Le philosophe ne possĂšde pas la vĂ©ritĂ©, il la recherche. Certains philosophes comme Socrate par exemple pense que la reconnaissance de sa propre ignorance est la condition pour trouver la vĂ©ritĂ©. Le doute permet de trouver la vĂ©ritĂ© lorsquâon parle dâillusion par exemple. ne illusion est une pparence trompeuse, une perception fausse, un jugement erronĂ©,⊠Le philosophe Platon parle de cell 3 OF s une perception fausse, un jugement erronĂ©âŠ. Le philosophe Platon parle de celle-ci dans le texte La RĂ©publique. Dans lâextrait du mythe de la caverne, Platon met en scĂšne des prisonniers ligotĂ©s de tel sorte quâil tourne le dos Ă la lumiĂšre et quâils ne voient que des ombres, sans savoir ce quâelles sont. Ils sont par la suite libĂ©rĂ©. Les prisonniers souffrent dâĂ©blouissement, dâexcĂšs de lumiĂšre et de traumatisme. Page 1 sur 2 Finalement les sujets sont forcĂ©s e sortir physiquement et mentalement de la caverne. Une fois dehors ils sâhabltuent Ă la lumiĂšre. Grace une la rĂ©flexion et au doute, ils se rendent compte de lâillusion dont ils ont Ă©tĂ©s victimes. Ces hommes Ă©taient prisonniers des apparences car ils ne remettaient pas en doute ce quâils voyaient. Le doute relativement Ă la connaissance est alors dĂ©fini comme le contraire de lâadhĂ©sion donnĂ© sans preuve Ă une idĂ©e, le doute est le recul nĂ©cessaire de la rĂ©flexion pour sâhabituer Ă la lumiĂšre de la raison. Le doute progressif sâapplique aux vĂ©ritĂ©s scientifiques. Celles-ci e sont pas seulement provisoires, elles font lâobjet dâun questionnement permanent dans le but de les remettre en question et de les tester. Les savants partent toujours du principe que leurs thĂ©ories sont peut-ĂȘtre fausses et quâils doivent les renforcer en les soumettant Ă des nouvelles expĂ©riences ou en les exposant Ă dâautres thĂ©ories concurrentes. De ce point de vue, la vĂ©ritĂ© ne peut 4 OF S expĂ©riences ou en les exposant Ă dâautres thĂ©ories concurrentes. De ce point de vue, la vĂ©ritĂ© ne peut jamais ĂȘtre dĂ©finitive au sens ou, si certaines thĂ©ories sont considĂ©rĂ©es comme vraies car on a pas montrĂ© quâelles Ă©taient fausses, il nâen reste pas moins que le savoir absolu nâest pas atteint et que le progrĂšs de la connaissance en gĂ©nĂ©ral est susceptible dâaboutir a une remise en cause de que lâon considĂ©rait jusque lĂ comme vrai. Selon Descartes lâidĂ©e devient vrais » lorsquâelle est soumise ? lâexamen du doute. A travers ce doute on dĂ©crypte un secret, on dĂ©couvre une rĂ©alitĂ© cachĂ©. Quand une vĂ©ritĂ© est dĂ©couverte elle prend son sens, sa puissance. Grace Ă ces deux cas on voit que le doute peut ĂȘtre la dĂ©marche de la vĂ©ritĂ©. AprĂšs avoir vue le caractĂšre destructeur du doute sur la vĂ©ritĂ© et le contraire, son caractĂšre progressif on peut en conclure que la vĂ©ritĂ© Ă©voque une notion de dĂ©passement. Son cote dogmatique ne sâapplique quâĂ une toute petite partie de la population, alors que le doute qui nous mĂšne Ă la vĂ©ritĂ© nous concerne tous. Mais la vĂ©ritĂ© est surtout en mouvement. Les philosophes Bachelard et Hegel pense tous les deux que la vĂ©ritĂ© nâest ni dĂ©finitive ni absolue. Elle a un caractĂšre inĂ©puisable , on peut toujours rajouter Ă celle-ci. Elle est rectifiable de façon permanente.Voirle cours sur le jugement . Vous pouvez utiliser Platon, le soleil la ligne la caverne en distinguant la croyance crĂ©dulitĂ© (b de la ligne )et la croyance au postulat de la raison (c de la ligne) II. Douter est-ce renoncer Ă la vĂ©ritĂ©? 1) Douter n'est-ce pas commencer par distinguer l'opinion de la science: considĂ©rer comme hypothĂšse La difficultĂ© Ă atteindre la vĂ©ritĂ© peut conduire l'homme Ă douter de sa rĂ©alitĂ©. Faut-il vraiment rechercher la vĂ©ritĂ© ou au contraire trouver une forme de sagesse en y renonçant ? I La vĂ©ritĂ© un idĂ©al inaccessible ? 1 Le scepticisme Si l'on dĂ©finit la vĂ©ritĂ© comme l'adĂ©quation entre le discours et la rĂ©alitĂ©, alors atteindre la vĂ©ritĂ© suppose un moyen de vĂ©rifier si ce que l'on dit correspond bien Ă la rĂ©alitĂ© en soi. Les sceptiques comme Sextus Empiricus considĂšrent que l'homme ne peut pas atteindre la vĂ©ritĂ©, dans la mesure oĂč ni sa raison, ni ses sens ne lui permettent de saisir la rĂ©alitĂ© telle qu'elle est. Cette thĂšse a des implications morales. Ce qui rendrait l'homme malheureux, ce n'est pas le doute mais le fait de croire possĂ©der la vĂ©ritĂ©. Suspendre son jugement permettrait donc Ă l'homme d'ĂȘtre heureux. 2 Les limites du scepticisme Pour Aristote, un scepticisme intĂ©gral conduit Ă l'inaction, car toute action implique une croyance qui la motive, et au silence, car dire quelque chose implique toujours une affirmation. Ainsi, le scepticisme se nie lui-mĂȘme. Il semble donc nĂ©cessaire de ne pas abandonner l'idĂ©al de vĂ©ritĂ©. II La vĂ©ritĂ© une valeur parmi d'autres ? Le terme d'idĂ©al est ambigu, car il dĂ©signe tantĂŽt ce que l'on ne peut pas atteindre, tantĂŽt ce que l'on doit poursuivre. La vĂ©ritĂ© est un idĂ©al en ce qu'il paraĂźt lĂ©gitime de la rechercher. Atteindre la vĂ©ritĂ© est donc un objectif porteur de sens. La vĂ©ritĂ© est ainsi une valeur importante, d'un point de vue individuel et collectif. Mais n'entre-t-elle pas en conflit avec d'autres valeurs importantes ? 1 VĂ©ritĂ© et politique Certes, la vĂ©ritĂ© est une valeur importante en politique on attend des hommes politiques qu'ils disent la vĂ©ritĂ©, des citoyens qu'ils se tiennent informĂ©s de l'actualitĂ©. Mais dans la mesure oĂč l'activitĂ© politique engage des dĂ©cisions quant Ă l'avenir, la politique ne saurait se rĂ©duire Ă une science. C'est pourquoi l'efficacitĂ© d'un discours importe plus que sa vĂ©ritĂ© pour les sophistes. La politique n'est pas la simple mise en Ćuvre d'une vĂ©ritĂ© prĂ©alablement dĂ©gagĂ©e. Elle implique des convictions qui ne sont pas de l'ordre de la connaissance. Pourtant, la constitution d'un espace public implique des dĂ©bats dont l'horizon est toujours la vĂ©ritĂ©. Ainsi, pour Arendt, si la vĂ©ritĂ© n'est pas la seule valeur qui compte en politique, elle revĂȘt nĂ©anmoins une importance considĂ©rable pour distinguer les diffĂ©rentes opinions. Respecter la vĂ©ritĂ© factuelle » est une condition du dĂ©bat. Ă noter Alain insiste sur la nĂ©cessitĂ©, pour les citoyens, de s'interroger sur la vĂ©ritĂ© des discours des diffĂ©rents acteurs publics. Si le citoyen doit obĂ©ir aux pouvoirs, il doit cependant aussi s'en mĂ©fier. 2 VĂ©ritĂ© et bonheur Dans la mesure oĂč la recherche de la vĂ©ritĂ© implique un effort, elle semble s'opposer au bonheur individuel. Pourquoi chercher la vĂ©ritĂ© si celle-ci vient dĂ©ranger mon confort ? En ce sens, l'illusion paraĂźt plus douce que l'effort Ă fournir pour atteindre la vĂ©ritĂ©. Kant montre que la recherche de la vĂ©ritĂ© est aussi un effort d'Ă©mancipation de toutes les tutelles illĂ©gitimes qui prĂ©tendent dicter Ă l'individu sa conduite ou sa pensĂ©e. Il s'agit de sortir d'un Ă©tat de minoritĂ© dont nous sommes nous-mĂȘmes responsables, par paresse ou par lĂąchetĂ©. Ainsi, la vĂ©ritĂ© est un idĂ©al au sens oĂč les hommes doivent sans cesse la chercher pour ĂȘtre vĂ©ritablement libres. g5w9HT7.